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Management toxique : la Cour de cassation valide un licenciement pour faute grave individuelle

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Un manager licencié pour comportement autoritaire : les faits

Dans l’affaire jugée (arrêt n°23-14.492), un salarié embauché comme responsable d’édition avait déjà reçu un avertissement pour son style de gestion autoritaire et rigide. Quelques mois plus tard, malgré cet avertissement, les plaintes des collaborateurs se multiplient.
Le médecin du travail alerte sur une souffrance généralisée dans l’équipe.
L’employeur engage alors un licenciement pour faute grave.

La cour d’appel avait refusé de valider ce licenciement, estimant que l’absence de réaction sérieuse de l’employeur relativisait la gravité des faits.
Mais la Cour de cassation casse cette décision.

Une faute grave individuelle malgré l’inaction de l’employeur

Selon la chambre sociale, la faute grave s’apprécie uniquement à partir des agissements du salarié, indépendamment du comportement de l’employeur ou des autres salariés. Même sans enquête interne ou nouvelle sanction disciplinaire, des méthodes de management dévalorisantes et rigides peuvent suffire à rendre la poursuite du contrat impossible.

Ainsi, la haute juridiction légitime le licenciement immédiat du salarié, en raison de l’impact de son comportement sur la santé mentale des membres de son équipe.

Une avancée juridique sur la reconnaissance du management toxique

Cet arrêt constitue un tournant : pour la première fois, la Cour de cassation assimile un style de management toxique à une faute disciplinaire grave, dès lors qu’il génère un mal-être documenté.

Les pratiques incriminées ne relèvent pas de la violence manifeste ou du harcèlement caractérisé. Ce sont des comportements insidieux mais persistants : rigidité, manque d’écoute, autoritarisme, dévalorisation systématique.

Ce qui change :
le style managérial devient juridiquement analysable au prisme de ses effets sur la santé psychologique des collaborateurs.
La responsabilité individuelle est engagée indépendamment du contexte

 

Trois enseignements pour les entreprises et RH

1. La tolérance zéro envers les méthodes délétères

Même un cadre performant sur le plan technique peut être sanctionné si son comportement nuit durablement à son équipe. Le climat social devient un critère RH aussi central que les résultats.

2. L’absence d’action de l’employeur ne protège pas

L’entreprise ne peut se réfugier derrière son inaction pour justifier un maintien du salarié fautif. La faute grave existe en soi, dès lors que les faits rendent impossible toute collaboration future.

3. Le médecin du travail devient un acteur clé

Le signalement du médecin du travail a ici été déterminant. Cela souligne l’importance de renforcer le lien entre médecine du travail, direction et RH, pour repérer précocement les risques managériaux.

Une jurisprudence qui s’inscrit dans une évolution plus large

Ce n’est pas un arrêt isolé : la Cour de cassation a rendu plusieurs décisions similaires le 6 mai 2025, appelant les juridictions à analyser les faits de harcèlement ou de souffrance au travail dans leur globalité.

Ce qu’en disent les experts

“Cette décision va obliger les entreprises à ne plus tolérer certains styles de management sous prétexte d’efficacité. Le bien-être psychologique des équipes devient un critère de légalité du comportement managérial.”
Claire P., juriste en droit social

“La Cour a posé une balise claire : on peut être licencié pour ce qu’on fait ressentir aux autres, même sans injures ni agressions.”
David M., psychologue du travail

Ce qu’il faut retenir

La faute grave peut être retenue même en l’absence de réaction de l’employeur.

Un management toxique (même sans violence explicite) peut justifier un licenciement immédiat.

Les témoignages de l’équipe et les alertes médicales jouent un rôle central.

L’arrêt marque une nouvelle ère dans la reconnaissance des souffrances au travail liées aux comportements hiérarchiques.

Source: arrêt n° 23‑14.492 de la Cour de cassation, chambre sociale, rendu le 6 mai 2025 :