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Obligation de sécurité : Rappel face à l’inaction des employeurs

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Le 27 mars 2025, dans une décision (CA Versailles, Ch. sociale 4-6, n° 23/00202), la Cour d’appel de Versailles rappelle avec force que le silence de l’employeur face à une alerte de harcèlement moral n’est pas une option. Ce jugement vient poser un jalon essentiel dans la lutte contre l’inaction patronale et la banalisation des souffrances psychologiques au travail.

Une mutation abusive et des alertes ignorées

M. [R] [K], salarié investi et promu en interne, est brutalement déplacé à plus de 55 km de son lieu de travail initial. Derrière cette mobilité déguisée, il dénonce un véritable harcèlement moral. Pourtant, l’entreprise, Vinci Facilities, reste muette. Pas d’enquête, pas de réaction, pas même un geste. Le conseil de prud’hommes ferme les yeux. Mais la cour d’appel, elle, choisit d’ouvrir les siens.

Une clause de mobilité abusive balayée

La société pensait se couvrir derrière une clause de mobilité aux contours flous. Mais la cour est claire : une clause qui permet d’envoyer un salarié à l’autre bout de la région sans limitation géographique n’est pas licite. Toutefois, le salarié ayant contesté tardivement cette clause, la cour ne peut retenir la mutation comme illégale. Un camouflet juridique, mais pas une défaite morale.

L’obligation de sécurité : un impératif non négociable

Le cœur de l’affaire réside ailleurs. M. [R] [K] a alerté son employeur sur une situation de harcèlement. Que fait Vinci Facilities ? Rien. Et c’est précisément ce « rien » que la Cour d’appel sanctionne. Selon l’article L. 4121-1 du Code du travail, l’employeur a une obligation de sécurité de résultat. En ignorant les alertes, l’entreprise a manqué à son devoir. Elle est condamnée. Faiblement – 1 000 euros – mais symboliquement, puissamment.

Une décision salutaire, mais encore timide

Ce jugement rappelle que le droit du travail n’est pas qu’un empilement de textes, mais un rempart contre l’indifférence. Il enjoint les entreprises à mettre en place des procédures concrètes de traitement des alertes. Car derrière chaque signalement, il y a une personne, un vécu, un cri souvent étouffé.

Vers un droit du travail plus protecteur ?

L’arrêt de la Cour d’appel de Versailles s’inscrit dans une dynamique de responsabilisation des employeurs. Il reste encore du chemin pour faire de l’obligation de sécurité un véritable levier de prévention, et non un simple outil répressif. Mais une chose est sûre : en matière de harcèlement, le silence n’est plus une option.